Pendant les jours qui viennent d'entourer le 1er anniversaire de la victoire d'Emmanuel Macron, la France est retombée dans un de ses vieux travers : chercher à toujours tout expliquer. La caricature a été l'émission de BFM TV "le casse du siècle", où il était prêté à Emmanuel Macron non seulement la capacité à bien s'organiser mais même celle de prévoir tout ce qui allait se passer dans le camp des autres, ce qui est manifestement impossible tant une élection relève d'une alchimie totale. Il y a dans cette volonté une arrogance particulière alors que le processus mériterait tellement plus d'humilité en acceptant la part d'imprévisibilité dans une élection. C'est la culture du "on refait le match" en interprétant chaque action en fonction du résultat final désormais connu. A l'opposé d'une réalité qui demande beaucoup plus d'humilité. La meilleure illustration de cette humilité a été donnée en 2008 par The Economist dans son titre sur Obama "It's time" (c'est l'heure). Il y a un moment où le temps est venu. J'ai encadré cette couverture dans mon bureau comme rappel permanent à l'humilité. Une victoire est intervenue. Pourquoi ? Comment ? Les facteurs sont souvent très nombreux. Mais à ce moment là, ils se sont ajustés pour produire ce résultat. Les professionnels de la politique vivent à l'opposé de cette humilité. Ils sont les partisans de l'offre fermée c'est à dire l'offre qui passe par la leur. Cette époque là est finie. Obama l'a montré en 2008 : il a gagné ... sans parti tenu alors par les Clinton, sans financement garanti, sans la bonne couleur de peau face à la tradition, sans expérience au Sénat... Tous les "moins" qui sont devenus des "plus". Comme Trump en novembre 2016. Comme pour Emmanuel Macron en 2017. Comme actuellement pour bon nombre de candidats qui créent des surprises dans les élections intermédiaires américaines de novembre 2018. L'opinion moderne n'a plus de "directeurs de consciences". Ou plutôt, elle chasse vite ceux qui veulent se comporter en directeurs de conscience. C'est ce regard qui a fait défaut ces dernières semaines. L'opinion a toujours été difficile à prévoir dans une démocratie. Et l'opinion moderne est encore plus imprévisible que jamais. C'est dommage qu'il n'y ait pas eu davantage de voix pour exprimer un constat simple : "c'était l'heure. Il a été celui qui a permis, notamment grâce à une couverture médiatique considérable, l'alternative face à une offre fermée que l'opinion ne voulait plus. Il ne pouvait pas prévoir et encore moins organiser que l'opinion publique ne veuille plus de cette offre fermée traditionnelle à ce point. Ce fut sa chance à ce moment là. C'était l"heure !". Avec ce réalisme, on aurait économisé beaucoup d'heures d'antenne mais surtout gagné beaucoup d'honnêteté d'analyses.